Tout repose sur les relations

Il y a beaucoup de gens formidables dans le domaine des courses sous harnais – la plupart d’entre nous le réalisons.

Mais chacun a ses détracteurs, n’est-ce-pas? Chacun a ses ennemis ou des gens qui ne les aiment tout simplement pas. Et bien, si Paul MacDonell en a, ils sont certainement très difficiles à trouver. Par Dan Fisher / Traduction Louise Rioux

* * * *

Un vrai gentleman, le conducteur de 57 ans (qui pourrait encore passer pour en avoir 37), est né et a grandi à Oshawa, Ontario, et sera introduit au Temple de la Renommée Canadien des Courses de chevaux sous harnais en 2020, et cette sélection est des plus populaire.

Les statistiques sont là, sans l’ombre d’un doute: plus de 122 M $ en bourses; 5 623 victoires; 34 saisons consécutives en conduite de gagnants de 1 M $ ou plus. Puis viennent les titres : un trophée O’Brien à titre de meilleur conducteur canadien; gagnant de huit Breeders Crowns, de multiples victoires en Elegantimage, William Wellwood Memorial et Peaceful Way, une North America Cup et un Metro Pace, pour n’en nommer que quelques-uns. La liste des chevaux qu’il a conduits est impressionnante : Somebeachsomewhere, Admirals Express, Village Jiffy, Billyjojimbob, Duke of York, Elusive Desire, Lifetime Dream, Laddie, Jeremes Jet – la liste n’en finit plus – mais les bons chevaux deviennent grands lorsque de grands conducteurs sont derrière eux et l’homme dont les couleurs familières rouge et blanc qui a été un pilier du circuit OJC/WEG durant au-delà de trente ans, en est un parfait exemple.

Dans le cas de Paul MacDonell cependant, ce sont plus que les statistiques - c’est aussi l’homme derrière elles. Parlant de classe, de dignité et de professionnalisme, Paul MacDonell peut être considéré comme un membre du temple de la renommée parmi tous les détenteurs – parlez-en à ses collègues.

Lorsque récemment nous avons demandé à un de ses compétiteurs de longue date en piste, il ne lui a pas fallu beaucoup de temps pour en arriver à une citation exprimant exactement ses sentiments envers le nouveau conducteur admis au temple de la renommée.

« C’est un conducteur qui vous défait, et que vous félicitez de l’avoir fait, parce que c’est quelqu’un de tellement bien… allez y comprendre quelque chose! Rires. »

~ Randy Waples.

Pour commencer, comment le populaire Paul MacDonell a-t-il intégré l’industrie du Standardbred? Évidemment, par sa famille.

« Mes parents sont arrivés du Cap Breton au cours des années 1959 ou 1960. Ma sœur est née en 1961 et j’ai suivi en 1963. Mon père, Blaise, ainsi que ses frères ont toujours eu des chevaux autour d’eux quand ils étaient jeunes… ils coursaient sur la glace et sur de petites pistes autour de Cap Breton, et le sport l’a tout simplement suivi ici. Il travaillait chez GM et nous avons toujours eu deux ou trois chevaux à côté que nous faisions courir à Kawartha. J’allais l’aider après l’école... il les entraînait après son travail. Nous louions quelques stalles à différents endroits en banlieue d’Oshawa.

« J’ai vraiment eu de nombreuses ‘discussions’ avec mon père à l’effet que je ne devais pas avoir l’intention de faire courser des chevaux comme gagne-pain, et j’ai dû promettre à ma mère que je compléterais ma douzième année avant d’essayer autre chose. J’ai toujours aimé les chevaux par contre, et n’ai jamais été un grand adepte de l’école. J’ai terminé mes études secondaires par contre, comme je l’avais promis à ma mère, » dit MacDonell.

« Quand j’ai obtenu ma licence de conducteur (en 1981), ce n’est qu’en août que j’ai obtenu mon premier départ à Kawartha, mais en 1982, j’ai commencé à obtenir des conduites à la pige et par la suite, les choses ont commencé à bouger pour moi. Il y avait des courses les mardis, jeudis, samedis à Kawartha et j’y étais toujours. À Belleville, c’étaient les vendredis en soirée et il y avait aussi des programmes lors de congés les lundis, ainsi que les mercredi soirs au Old Barrie Raceway… j’allais aux courses là à tous les soirs durant un certain temps – peu m’importait.

« Nous avions quelques chevaux de moindre valeur qui pouvaient valoir quelque 10 000 K $, lesquels pouvaient convenir pour le Jockey Club durant l’hiver, alors j’ai pu les conduire de temps à autre – et je menais également pour d’autres personnes. Puis, à l’hiver 1983 ou ‘84, je suis allé travailler à Greenwood pour Doug Brown. Il emmena environ 20 chevaux à The Meadowlands et m’en laissa environ six pour les courses d’hiver. Je n’y suis pas resté durant toute l’année et suis revenu à mon compte. Je me souviens avoir eu quatre stalles à Greenwood et j’étais tellement heureux de voir mon nom sur la liste des détenteurs de stalles. Nous avions une bonne poulinière OSS du nom de Cavans Jovial et elle m’a beaucoup aidé à ce moment-là. Puis j’ai rencontré les garçons Cherry, et nous en avons eu quelques-uns, et les choses ont démarré à partir de là.

Les ‘Cherry Boys’ auxquels Paul se réfère, étaient Jim et John Cherry de Pickering, Ontario, qui provenaient de la famille ayant construit, possédé et opéré le Cherry Downs Golf Course à ce moment-là. Particulièrement des amateurs et parieurs sur les chevaux jusque là, ils décidèrent de plonger du côté propriété des choses. « J’étais d’Oshawa et ils étaient de Pickering, mais je ne les connaissais pas… J’ai reçu un appel à l’écurie un jour à l’effet que deux hommes à la barrière de l’écurie voulaient me voir pour acheter un cheval, je suis alors descendu les rencontrer. Ils m’ont dit qu’ils voulaient réclamer un cheval et me le confier pour l’entraînement et la conduite… il s’agissait de parieurs et ils connaissaient les chevaux assez bien, et il était de leur intention de les choisir eux-mêmes. C’était assez rare à cette époque-là car la plupart des propriétaires vous donnaient un chèque vous demandant de leur trouver un cheval, mais je n’avais aucun problème avec cela. Nous en avons réclamé un la fin de semaine suivante qui a assez bien fait, et éventuellement, ils étaient avec moi, achetant et réclamant des chevaux durant un certain nombre d’années. Nous avions une vraie belle relation et passions de bons moments ensemble. J’ai entraîné leurs chevaux jusqu’au moment où j’ai abandonné mon écurie au début des années 1990… et ils ont donné leurs chevaux à mon assistant entraîneur Joe MacIsaac et ils ont connu quelques bonnes années avec lui par après aussi.

« Une histoire drôle dont je me rappelle concernant ces deux garçons fut le moment où j’ai emmené leur bonne poulinière, La Pan Dow, à Meadowland au milieu des années quatre-vingt. Une grève sévissait là-bas et j’ai emmené quelques chevaux au New Jersey. Il n’était pas facile d’y obtenir des stalles, vous deviez remettre les papiers à Joe DeFrank, le secrétaire de course, et lui expliquer pourquoi ils appartenaient à cet endroit… ce genre de choses. La Pan Dow pouvait être classifiée comme étant une trébucheuse, et cette piste-là l’a récupérée… elle est sortie et a gagné son premier départ et je pense qu’elle a assez bien payé. Je n’oublierai jamais mon retour au cercle du vainqueur alors qu’un des gars tenait en mains une grosse pile de billets (rieur). J’étais certain que nous étions à la caméra et tout ce que j’espérais c’était de le voir remettre ces billets dans sa poche. »

Une carrière passée en entraînements et conduites et qui s’échelonne sur presque 40 années compte sans l’ombre d’un doute, de nombreux bons souvenirs, mais quand on lui demande de partager avec nous quelque chose qui se démarque réellement dans son esprit, et que peu de gens connaîtraient, MacDonell de sa voix douce, raconte ce dont il se souvient, soit une partie importante de ce qui pourrait devenir une carrière d’intronisé au temple de la renommée.

« La seule chose qui me revienne toujours en mémoire depuis ces années, et qui a fait une différence pour moi, et que je n’oublierai jamais, c’est le marché conclu concernant Robins Wonder, et ce qu’il a fait pour moi quand il a participé à l’International Trot à Roosevelt en 1986. C’était la première fois que je franchissais l’échelon supérieur des courses, et je n’étais alors qu’un jeune de 23 ans. Représenter le Canada dans cette course, devant ce genre de foule, était alors très important pour moi.

« Robins Wonder était le cheval de la famille de mon épouse Lynn... Le père de Lynn, Jack, l’entraînait – il travaillait chez GM tout comme mon père. Nous nous sommes mariés en 1986 mais nous nous fréquentions depuis environ quatre ans. Ma famille et la sienne étaient devenues amies à Kawartha, bien avant que je conduise des chevaux, et éventuellement, nous avons commencé à nous fréquenter, alors j’avais de bonnes relations avec la famille depuis plusieurs années.

« Je conduisais le cheval, et il fallait gagner la Série Tie Silk à Greenwood, pour être admis à l’International Trot. Je me souviens que Armbro Agile était le cheval à battre lors du Tie Silk… c’était un dur à cuire. Nous l’avons surpris à la rampe et l’avons battu par un nez dans la finale, gagnant notre place à l’International.

« Je me revois descendre, c’était tellement gros… ils ont amené les chevaux sous les feux d’un projecteur comme à la Old Home Week. J’étais tellement intimidé… des gens comme Hervé Filion et Buddy Gilmour me saluaient parce que j’étais un Canadien, et je ne pouvais tout simplement pas croire ce qui m’arrivait. Je n’étais sorti du Canada, pour les courses, qu’à quelques reprises et cela, c’était tellement gros.

« La course s’est courue sur un mille et quart et je me rappelle que je tremblais comme une feuille quand je suis sorti dans le noir pour le défilé d’avant-course… la foule criait et hurlait comme des fous. Ils couraient pour une bourse de 250 000 $, et nous avons terminé en deuxième position. Toute la famille s’était impliquée et tous étaient là, et je me souviens avoir célébré dans l’écurie après. Tous les autres étaient remontés à la grande tribune et nous, nous faisions le party dans l’écurie… on s’en fichait (rires).

Parlant de grands moments et grands chevaux avec Paul MacDonell, c’est difficile de ne pas aborder le sujet du plus grand Standardbred de tous les temps, Somebeachwhere. Comment se fait-il que Paul se soit retrouvé sur le sulky derrière ce grand champion?

« Cela est le fruit de ma relation avec Brent MacGrath dans les années “80 à Greenwood Racetrack – même chose. Alors que j’étais établi là dans ces années-là, j’étais l’un des six premiers occupants des écuries extérieures et Brent est arrivé de Truro avec trois ou quatre chevaux. Je suis parti une journée après mon travail accompli et l’espace était vide, et quand je suis revenu le lendemain matin, son écurie était toute installée… ils étaient entrés au beau milieu de la nuit. Il se tenait debout en bas et je suis donc allé lui parler. Comme il venait de Nouvelle-Écosse et moi avec mes racines, du Cap Breton, nous avons jasé et sommes rapidement devenus ce qu’on appellerait des amis de toujours. Je pense qu’il aurait pu être placé dans une écurie différente et il aurait pu devenir quelqu’un que je connaissais et à qui j’aurais pu dire hello, mais plutôt, je crois que cela devait arriver. »

Mais si Paul MacDonell n’était pas la personne au grand cœur et amicale qu’il est, et qu’il ne s’était pas intéressé et lié d’amitié avec le nouvel étranger en ville, la relation ne se serait pas développée non plus – le hasard peut jouer un rôle dans certaines choses, mais dans la plupart des cas, nos gestes font notre propre chance.

Les deux hommes sont restés en contact régulièrement durant des années et des années. « Brent a continué à vendre des voitures à Toronto et est revenu à Truro, mais nous sommes toujours restés en contact. Certains soirs, alors que je rentrais à la maison après les courses, il m’appelait. Il a travaillé au Truro Raceway durant un certain temps, et il m’a fait venir et courir lors de défis entre conducteurs, des choses comme cela. Immédiatement avant d’acheter ‘Beach’ il m’avait demandé mon avis sur certains reproducteurs ontariens, et quand il mentionna Mach Three, je lui dis que je les aimais beaucoup, et que j’achèterais un Mach Three en une minute. Quand il l’a acheté, il m’a tout de suite appelé pour me dire qu’il ne pouvait pas croire qu’il l’avait obtenu pour la somme de 40 000 $ - disant que ça ne se pouvait pas (et riant). Tout l’hiver, il m’a appelé régulièrement pour me dire à quel point il était fantastique. J’avais déjà entendu de telles histoires auparavant (en riant), mais il avait très certainement raison. » On connaît la suite.

Un courant tend à se développer ici alors que quelqu’un remarque le lien existant avec la famille de son épouse qui a aidé Paul vers le International Trot à Roosevelt; le lien avec les garçons Cherry qui l’ont aidé à garder ses stalles remplies à capacité durant ses jours d’entraînement; le lien avec Brent MacGrath qui l’a fait atterrir derrière un poulain Mach Three de deux ans non débourré à l’été de 2007.

Si vous ne le saviez pas, Paul MacDonell a aussi remporté huit titres en Breeders Crown , et comme Paul évoque brièvement ses souvenirs, surprise-surprise, la tendance de solides relations personnelles avec la plupart des personnes qu’il a rencontrées se poursuit.

BAYS FELLA (1990): « Ma première Breeders Crown. Mike DeMenno l’avait entraînée et il était de Buffalo. La même chose en quelque sorte… Je l’ai rencontré à Greenwood. Il l’envoyait en matinée, pour courser à Greenwood et il atterrit dans mon écurie à quelques reprises. Nous sommes devenus des amis et éventuellement, il eut besoin d’un conducteur pour Bays Fella. C’était un bon cheval et il m’avait envoyé à Pompano pour le mener dans la Breeders Crown. C’était un gros coureur de ‘longshot’ et nous avons battu Brownie avec Topnotcher, qui était le grand favori. »

BILLYJOJIMBOB (1991): « Murray Brethour a trébuché dans un déversement et s’est gravement blessé à l’épaule. J’étais un bon ami de Murray, et Mike (Wade), depuis nos jours à Kawartha – Murray et moi avons fait nos armes ensemble à Kawartha – alors ils m’ont demandé de le mener durant un certain temps. J’aimais le mener… deux doigts suffisaient. Je crois que je l’ai mené à quelque huit reprises et nous n’avons jamais été battus. »

LIFETIME DREAM (1993): « C’était à Mohawk, il y avait beaucoup de monde ce soir-là… la moitié de Clinton y était. Butch Elliott l’entraînait et ce fut la même chose je crois… il travaillait pour Jerry Duford dans la ligne droite arrière depuis plusieurs années, et c’est ainsi que je les ai connus… j’ai toujours eu de bonnes relations avec ces gens – ils se sont toujours appréciés. »

VILLAGE JIFFY (1994) & VILLAGE JASPER (1997): « Je n’ai pas beaucoup conduit pour Woody durant un certain temps et me voilà à Village Jiffy ce soir-là – je pense que Steve Condren l’a intercepté. Je me suis fait emboîter ce soir-là, mais nous avons poursuivi notre route et avons facilement gagné la semaine suivante, et à partir de là, les choses ont bien été. Parlons d’une grande relation avec une fantastique famille – Jean et Paula et Bill, furent tous tellement importants et ont tellement fait pour moi. »

DUKE OF YORK (2001): « Un autre gars, John Bax, avec qui j’ai connu une belle amitié dès nos jours à Kawartha et jusqu’à maintenant. C’était la Breeders Crown pour les deux ans, et nous avons gagné avec lui, et l’année suivante, nous avons terminé troisième dans l’Hambro. »

JEREMES JET (2005): « J’ai obtenu de le conduire parce que je connaissais Joe Frasier... il était le soigneur et deuxième entraîneur pour Tom Harmer. Je ne connaisais pas vraiment Tom Harmer mais je connaissais Joe et je crois que c’est comme cela que j’ai obtenu de le mener lorsqu’ils sont venus ici pour le Metro. Nous avons gagné le Metro, la Governors Cup ainsi que la Breeders Crown, gagnant ainsi 1 M $ à deux ans. »

SOMEBEACHSOMEWHERE (2008): La relation Brent MacGrath est décrite plus haut.

La preuve, comme on dit, est dans le pudding.

Paul MacDonell est absolument un grand conducteur.

Paul MacDonell est même probablement un meilleur être humain.

Dans les mots d’un autre de ses compétiteurs de longue date :

« J’ai tellement de respect pour Paul MacDonell. Nous avons couru l’un contre l’autre durant plusieurs années et n’avons jamais eu de gros mots. Après toutes ces années, c’est une courte liste des conducteurs avec qui je n’ai eu de différends. Il a de la classe et peut encore très bien conduire.

~ Chris Christoforou.

Cependant, de toutes les histoires racontées à TROT par Paul et ses collègues, celle semblant le mieux refléter la vérité sur la façon dont cet homme traite les gens, vient d’une récente conversation avec un autre membre du Temple de la Renommée Canadien des Courses de chevaux – Dave Wall. Dave est l’un de ces vétérans conducteurs des circuits OJC et OSS quand un jeune Paul MacDonell se faisait les dents en apprenant son métier, et bien que ‘Wally’ n’ait pas été un soutien sur ce circuit avec Paul depuis bien plus qu’une décennie, le jeune conducteur en rouge-et-blanc traite encore le conducteur le plus âgé en rouge-et-blanc avec beaucoup de respec

Lorsqu’on a questionné Wall, 73 ans, au sujet de l’intronisation de Paul au Temple Canadien, et sur leur relation, ce dernier a répondu, « Je suis ravi d’apprendre qu’il fera son entrée au Temple de la Renommée. Paul et moi, ça remonte à bien longtemps alors qu’il n’était qu’un jeune homme… nous avons toujours été de bons amis. Je le vois encore – il vient de Guelph à tous les Noël et nous prenons un repas ensemble, » de dire le vétéran horseman avec grande fierté et joie dans sa voix.

Bravo Paul MacDonell – félicitations pour votre intronisation au Temple de la Renommée Canadien des courses de chevaux , et pour simplement être vous.

Cet article a été publié dans le numéro de juillet de TROT Magazine.
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