Sara Baillargeon a fait des adieux réticents et en pleurs à 'Marty', récon- fortée par le fait de savoir que sa famille avait fait tout ce qu'elle pouvait pour sauver le cheval.
Puis elle prit son téléphone et murmura 'Essayons ceci.' By Chris Lomon
Durant cinq semaines consécutives, quotidiennement, elle parcourait fidèlement la distance d'une demi-heure la menant à l'Ontario Veterinary College de Guelph, pour être aux côtés du standardbred bai, Musical Rhythm, un trotteur de haut-niveau, ayant participé à des compétitions d'envergure tant au Canada qu'aux États-Unis.
Et maintenant, entourée de sa famille, la soigneuse du cheval à la personnalité plus grande que nature, celui avec lequel elle avait tissé des liens dès le moment de leur première rencontre en 2015, s'est penchée et fit ses adieux au cheval de six ans de l'élevage Brittany Farms. Mais avant de le faire, Baillargeon mit la main dans sa poche, y trouva la relecture-vidéo de sa plus grande victoire, monta le volume et la fit rejouer pour Marty.
" Que nous coursions ce soir-là ou pas, j'étais là à chaque jour, " commença Sara. Les gens de l'OVC étaient tellement accommodants. Si je courais, je m'y présentais à minuit pour le voir, juste pour lui faire un bisou. Si nous ne courions pas, j'y allais avec un café et un magazine et passais quatre ou cinq heures avec lui. J'espère et je crois que le fait d'aller le voir chaque jour contribuerait à son retour à la maison. "
" Mais arriva le jour que je n'oublierai jamais, où j'ai appelé mon père et lui dist 'je crois qu'il est temps pour nous de lui dire au revoir. Il faut penser au cheval en tout premier lieu et nous ne voulions pas le voir souffrir. Mon père, ma mère et mon frère sont venus à Guelph et nous étions tous assis là pour Marty et tous et chacun lui dirent au revoir. Tout le monde pleurait. J'avais des reprises vidéo de ses courses sur mon téléphone et je lui ai montré sa victoire au Graduate deux ans auparavant, au New Jersey. Il se dressa les oreilles et la regardait sur mon téléphone. Il se leva, et il ne regarda jamais plus derrière après cela. J'ai cru au miracle. La connexion que ce cheval et moi avons, est quelque chose de difficile à décrire en mots. "
Musical Rhythm est entré dans la vie de Baillargeon et de l'écurie de son père il y a tout juste un peu plus de trois ans, quand l'entraîneur de longue date et propriétaire acheta le fils de Cantab Hall pour la somme de 33 000 $ à l'Encan Harrisburg Mixed Sale de 2015, à la fin de ses trois ans. Il a fait une impeccable première impression sur ses nouveaux équipiers, en gagnant ses deux premières courses par plusieurs longueurs, aux guides du frère de Benoît, Mario, dans le sulky.
Le cheval, à l'origine acheté au prix de 35 000 $ à la Lexington Selected Sale en octobre 2013, eut le même effet sur la jeune femme à qui on confia la tâche d'en prendre soin. " Nous avons immédiatement su qu'il était spécial, " dit Sara. " Il a tout simplement cette merveilleuse personnalité. Il est toujours heureux et il aime faire rire le gens. Il faut qu'il se fasse toujours remarquer. Il veut vous faire savoir qu'il est dans l'écurie. Il fera le nécessaire pour retenir votre attention. Qu'il hennisse ou vous parle, ou qu'il arrache sa couverture, son refroidisseur ou ses attaches - il aime faire tout cela - tout pour attirer votre attention. " Ce n'était pas passé inaperçu chez son père.
" Il aime avoir de l'attention, " dit Benoît. " C'est un drôle de cheval. "
Un drôle de cheval mais au grand talent. Bien qu'ayant connu un début difficile - perdant son allure lors de son tout premier départ à vie, à Pocono Downs le 11 juillet 2014 - il a également trotté quelques quarts rapides au cours de ses deux premières saisons en piste pour l'entraîneur Tony Alagna - soit quelque chose qui a attiré l'attention de Benoît. Tôt après être déménagé à son nouveau domicile au Canada, Musical Rhythm alla droit au but. À partir de novembre 2015 à mai 2016, il gagna 13 de ses 14 départs pour l'Équipe Baillargeon, y compris une série de onze départs consécutifs.
Le groupe de propriétaires, composé de Santo et Nunzio Vena, Claude Hamel et Benoît, ont vu leur titan trotteur balayer le Don Mills et le General Brock Series durant cette période.
Puis, en juillet de la même année, il allait connaître l'expérience de sa plus grande victoire, point de vue bourse, à The Meadowlands. Avec le légendaire John Campbell, membre du Temple de la renommée, sur le sulky, Musical Rhythm a surmonté le difficile détenteur de la première position et neuf rivaux accomplis pour s'emparer de la Finale de la Graduate Series en 1.51.2, son mille le plus rapide à ce moment.
" À ce jour, je dis à qui veut l'entendre, que ma victoire favorite a été la 'Graduate', avec un départ de la dixième place, " de dire Sara au sujet de la victoire ayant rapporté 118 750 $. " Ce fut un effort courageux. " Musical Rhythm allait connaître une saison 2017 mi-figue-mi-raisin l'année de ses cinq ans. De ses 20 départs, il a gagné six courses, ainsi que trois deuxièmes positions et deux troisièmes. Lors de sa dernière course de l'année, dans une course 'Preferred' à Woodbine, il a brisé son allure dès le départ pour terminer sixième, battu par 29 longueurs.
" Nous n'avons vraiment pas pu figurer ce qui n'allait pas chez lui, " se rappelle Benoît. " Nous lui avons fait passer des radiographies et ne pouvions toujours pas comprendre ce qui n'allait pas. "
Les choses allaient bientôt prendre une toute autre tournure, ce que personne de la famille Ballargeon n'avait anticipé. " C'était très inquiétant, " se rappelle Sara.
" C'est un guerrier et un combattant et j'étais convaincue qu'il allait s'en remettre lorsque nous l'avons conduit à l'OVC. Nous l'avions engourdi avec de la carbocaine afin de savoir si son mal à la patte arrière pourrait être relié à sa cheville… je crois que c'était le 1er mars de cette année. Il était prêt à se qualifier pour la saison, mais sa cheville s'est infectée suite à l'injection reçue.
" Ce devait être un simple rinçage de la jointure, il reviendrait à la maison et tout allait rentrer dans l'ordre. Mais ça ne s'est passé ainsi. Il y eut un tas de complications. Il dut retourner à Guelph, revenir à la maison puis y retourner une troisième fois. La troisième fois qu'il y est allé, l'infection avait pénétré l'os lui-même. Ainsi, traiter le mal comme une bactérie n'a rien donné de même que le traiter comme un champignon non plus. À chaque fois qu'il cessait ses antidouleurs, il boitait. Lors de sa quatrième chirurgie, ils ont gratté l'os infecté. Alors, il a un trou dans l'os, qui se calcifiera avec le temps. Mais la dernière fois qu'il est allé à Guelph, il y est resté jusqu'au 22 avril. "
Sara s'est assurée d'être là durant tout son séjour. Après deux mois et plus à l'OVC, Musical Rhythm est revenu à la maison pour seulement cinq jours.
" Quand je m'assoyais avec lui, je lui racontais ce qui se passait à l'écurie et que ses copains allaient aux courses. Cela peut paraître idiot, mais l'écurie lui appartient. Vraiment. Je pense qu'il écoutait chacun des mots que je disais. Si je connaissais une mauvaise journée et que j'éprouvais des difficultés… Je pouvais lui dire n'importe quoi. "
" Ce sur quoi je mettais l'accent consistait en la pensée positive. Je lui ai apporté ses jouets. Il m'enlevait mes lacets ou prenait mes sandales 'Crocs'. Il pouvait jouer avec mes cheveux. Je pouvais lire ou regarder une vidéo et il mettrait sa tête sur mon épaule et veillait sur moi. "
Dre Nathalie Côté, chirurgienne de la race équine à l'OVC, ainsi que l'équipe qui a travaillé sur Musical Rhythm, s'émerveillait du lien qui existait entre les Baillargeon et leur cheval.
" Je peux comprendre pourquoi la famille Baillargeon aime tellement ce cheval, " dit Côté. " Ce cheval, c'est quelque chose d'autre. Il est adorable, fort et il a toute une personnalité. Il n'a tout simplement pas abdiqué, même en ces temps difficil.es, La même chose va pour Sara et sa famille. C'est une bonne combinaison entre eux et le cheval. "
Durant toute cette épreuve, il ne fut jamais envisagé que Musical Rhythm allait reprendre sa carrière en course. Une retraite digne et méritée, voilà tout ce qui comptait pour le clan Baillargeon.
" Tout ce qui comptait c'était de le ramener à la maison et qu'il soit assez en santé pour vivre la retraite qu'il méritait, " dit Sara. " S'il avait été en assez bonne santé, je l'aurais entraîné pour la promenade. Mon père entretenait l'idée de le présenter comme étalon dû au fait que tout le monde l'aimait tellement, et en Ontario, la lignée Cantab Hall nous manque. Mais tout ce que mon père voulait pour lui, c'était qu'il soit en santé et heureux. "
" La dernière fois qu'il est allé là, je ne peux vous dire à quel point nous sommes venus près d'avoir à l'euthanasier, " dit Benoît. " Je ne voulais pas qu'il souffre. Le médecin m'a dit, 'Ben nous pourrions essayer un traitement de plus.´ Il allait vraiment mal et nous en étions rendus au point où nous devions prendre une décision. Alors, nous avons décidé de lui donner une autre chance. Et Ça marché. Qu'il ne course plus, ne m'importait aucunement. Là n'était pas le but. "
Mais le cheval qui a déjoué toutes les probabilités avait son propre plan.
Assez en santé pour revenir à la vie de la ferme, Musical Rhythm est revenu à l'écurie sur laquelle règne.
" Quand nous l'avons ramené à la maison, il était limité à la marche à la main, " dit Sara. " Mais il aime tellement son travail, qu'il était jaloux juste à regarder les autres chevaux par la fenêtre, alors qu'ils sortaient et couraient. Il n'y avait pas encore de plan de le faire courser encore, mais un jour, mon père a dit, 'Mets-lui le harnais'. J'étais quelque peu contre cela, mais il avait l'idée de lui faire porter le harnais et de juste marcher avec lui autour la piste. À tout le moins, cela le sortirait de là. La première chose que nous avons su, c'est qu'il courre et est aussi en santé que possible. "
Après deux courses de qualification en septembre, Musical Rhythm était en piste pour son premier départ en onze mois.
Le 2 octobre 2018, aux guides de Mario Baillargeon, il a fini troisième avec une cote de 22/1 dans une course 'Preferred' à Woodbine Mohawk Park, lors de sa première course depuis le 11 novembre 2017. Deux autres courses ont suivi se terminant avec deux cinquièmes places et une septième à l'ovale de Milton.
" Au troisième départ - il détenait la 10e position - mon père dit " Il va gagner ce soir, ", Sara se rappelle. " Cela n'a pas fonctionné. À son quatrième départ, mon père dit 'Ce soir est le bon soir.' Et bien, nous avons essayé une bride ouverte et cela n'a pas fonctionné non plus.
La première partie du Hollywood-type allait s'achever le 3 novembre à Woodbine Mohawk Park.
" Puis, à son cinquième départ, je suis seule avec lui, il part et il s'en va gagner, " dit Sara en riant. " Juste lui et moi… j'ai pleuré tout le long du chemin menant au cercle du vainqueur. Je me rappelle avoir demandé à oncle Mario de prendre une photo avec moi parce que je voulais la faire encadrer. S'il avait quitté après cela, j'aurais été ravie. Mais il voulait continuer. "
Son nouveau fan-club à l'OVC a reçu un texte de la part de Sara après la victoire.
" Nous nous sentions super bien après l'avoir finalement guéri de son épreuve, " dit Côté. " Jamais nous ne voulons perdre un cheval. Jamais. Vous n'avez aucune idée de ce que nous éprouvions de voir comment il s'en était sorti, particulièrement au début alors que les chances n'allaient pas en sa faveur. "
" Je reçois constamment des textes de la part de Sara. Dr Dubois, les trois chirurgiens ainsi que les techniciens là-bas, tout le monde est devenu fan de lui maintenant. "
Musical Rhythm a procuré aux Baillargeon et ses partisans un autre moment mémorable un soir pluvieux de fin de novembre à Milton. La victoire du 3 novembre est venue après que Marty ait reçu l'autorisation de baisser de quelques classes. Cela avait été suivi par deux deuxièmes places consécutives lors d'événements avec conditions. Maintenant, encore une fois, le trotteur au grand cœur, sa personnalité et son fan-club toujours croissant, s'est retrouvé dans la classe de haut niveau - le 'Preferred Trot.
Parti avec une cote de 9/1 et aux guides son conducteur régulier, le duo forma équipe pour un score de 2-1/4 longueurs, en 1.57.1 sur une piste mouillée. C'était la neuvième victoire 'Preferred' en carrière pour le trotteur et sa première depuis le 1er octobre dernier.
" Honnêtement, les chances qu'il course encore étaient maigres et nulls, " dit Benoît. " Je n'avais aucunement l'intention de le faire courir encore, mais il a démontré qu'il voulait y aller. S'il n'avait pas voulu, j'ai quelques poulinières tout comme mes partenaires, alors nous l'aurions vu devenir un étalon. Il descend d'une famille royale. Sa mère, Musical Victory, a gagné une course de la Breeders Crown pour les poulinières trotteuses rn 1998
Sa vie d'étalon, toutefois, devra être mise en veilleuse pour le moment.
" Il fut un si bon cheval pour nous, " dit Benoît au sujet du gagnant à 29 reprises en 73 départs rapportant près de 700 000 $ en gains. " Nous l'aimons. Et il aime vraiment avoir votre attention. Vous lui lancez une balle et il joue avec elle continuellement. Il joue au soccer avec une balle tout comme un être humain. Il la frappe et part à sa chasse.
" Il était tellement heureux d'être revenu ici, dehors, " dit Benoît. " Vous pouvez voir cela dans ses yeux. Vous pouvez voir son bonheur. "
C'est également ce que le 'horseman' voit en sa fille.
" Il fait partie de notre famille et il en sera toujours ainsi. C'est tout un cheval. Je parle de lui, de tout ce qu'il a traversé, et j'en ai la chair de poule. Je sais que ce qui existe entre Sara et ce cheval, sera toujours là tout comme il en sera toujours ainsi pour nous tous. "
Une belle histoire à la
Une belle histoire à la Hollywood. Je suis content pour la famille Baillargeon que tout se termine bien.