Daniel Clements: Enfin à la maison

Pour comprendre et apprécier l’histoire de Dan Clements aujourd’hui, vous devez au moins être un peu familier avec toute l’histoire. Dans le numéro de juin 2003 de TROT, il y a près de 20 ans, Chris Roberts s’est assis pour ce qui s’est avéré être une séance de « Questions-Réponses » captivante avec Clements, 39 ans. Aujourd’hui, en utilisant des extraits de l’article de 2003 au début, pour mettre ceux qui ne le sont pas, au courant, nous reprenons l’histoire de l’homme de famille dévoué qui, après une récente interruption de conduire de six ans, est de retour sur le sulky, non sans faire de grabuge au cours des derniers mois à Hiawatha, Dresden, Leamington et Western Fair. Beaucoup de choses ont changé dans la vie de Danny… et d’autres choses, pas autant. Quoi qu’il en soit, l’homme avec une capacité incontestable à conduire un cheval était tout aussi transparent avec TROT cette fois-ci qu’il l’avait été il y a toutes ces années - nous le remercions vraiment pour sa franchise. Par Dan Fisher // Traduction Manon Gravel

Extraits du numéro de JUIN 2003 de TROT Magazine

« La cocaïne a pris tout mon argent... et boire a ruiné ma vie. »

« Dans les années 80, tout était gros. Gros cheveux, gros sous, grosse drogue. J’étais un fêtard en évolution. Quand j’ai eu de l’argent, j’ai continué à faire la même chose. »

« Il y a une fausse rumeur selon laquelle nous étions riches, que nous sommes nés riches. Pourtant, quand on voulait 20 $, il [mon père] nous disait d’aller chercher un emploi. »

« ... en grandissant notre demeure a toujours été la maison festive... Chaque week-end, nous avions des fêtes... et quand ce cheval est arrivé [Cam Fella] papa a décidé que nous ferions la fête autour de lui. »

« Je ne sais pas si j’avais une puce sur mon épaule parce que j’ai été élevé par un homme... mais j’étais un peu un voyou à l’école et je n’ai jamais aimé prendre les ordres. »

« [Les gens pensaient] que rien de ce que je faisais n’était de moi-même, [ils pensaient] que c’était toujours parce que mon père me l’avait donné. »

« Nous avons eu un fils [Ryan] et deux ans plus tard [en 1989] nous avons eu une fille [Jennifer Ashleigh]… elle ne faisait pas ce que les enfants sont censés faire. Elle était molle alors nous l’avons emmenée chez un médecin et ils nous ont envoyés à Sick Kids (Hôpital pour enfants). Là, ils nous ont dit qu’elle avait un SMA, une amyotrophie spinale… Six mois plus tard, elle est décédée de la maladie. »

« Après cela, le party, ou peu importe comment vous appelez ça, pour essayer de cacher la douleur, est devenu vraiment atroce. J’ai [éventuellement] dégrisé juste assez longtemps pour décider que nous aurions un autre enfant… nous avions 75 % de chances d’avoir un enfant en bonne santé. »

« ... elle [Danica] l’avait aussi. Je suis resté à la maison pendant quatre mois, nous l’avons gardée à la maison. Avec notre première fille… ma femme [Mary] est restée à l’hôpital pendant quatre mois. Celle-ci [Danica] est décédée chez nous. »

« Je me suis retrouvé en cure de désintoxication pendant trois mois, c’était soit ça, soit j’allais me suicider. »

« Ma femme est chrétienne… elle priait pour moi… Un jour, j’attendais dans sa voiture et j’ai commencé à écouter cette [cassette] qu’elle avait… c’était comme si le gars sur la cassette me parlait. Depuis ce jour, j’ai changé ma vie. »

« Je serais probablement mort si ce n’était pas d’elle [Mary], aussi simple que ça. »

« … nous avons créé, mon père a créé une association caritative au nom de Jennifer (la Fondation Jennifer Ashleigh), cela dure depuis 13 ans… Nous avons collecté plus de 3,5 millions de dollars… Nous avons aidé plus de 3 000 enfants [en phase terminale]. Nous ne sommes pas du genre à les envoyer à Disney World… nous payons si quelqu’un doit prendre un appartement près de l’hôpital, payer le stationnement quotidien ou acheter un ordinateur à un enfant. »

« Ça change vraiment la vie des gens. C’est pour ça que mes filles sont nées, afin que nous puissions aider. C’était juste une question de savoir si j’étais prêt à accepter cela ou non.

« Je reçois maintenant, ce que j’ai voulu toute ma vie. Je suis père, mari, chrétien et conducteur de chevaux. C’est tout »

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C’était avant, et voici maintenant. Après avoir traversé plus d’épreuves et de turbulences que la plupart ne connaîtront jamais dans une vie, Daniel Clements a finalement semblé avoir sa vie sous contrôle à l’été 2003. Cependant, il n’avait encore que 39 ans à l’époque, il y avait donc encore beaucoup de vie à vivre. On se demandait où irait son histoire à partir de là ?

« Je venais juste de commencer à tenter ma chance de devenir un catch-driver un peu avant que cette histoire ne sorte”, a déclaré Clements à TROT aujourd’hui. “Je n’ai jamais vraiment été un catch-driver jusqu’à l’âge d’environ 37 ans [en 2001], et je n’avais aucune idée de ce dont il s’agissait jusque-là. Avant cela, tous les chevaux que j’avais conduits étaient des chevaux que nous possédions et entraînions également. Le catch-driving était une tout autre chose. J’essayais juste de comprendre et cela a pris quelques années… c’était tout un processus. »

« Je ne buvais plus. Rien de ce que j’avais été n’était encore là. J’ai changé mes couleurs de mon ancien vert et noir pour les couleurs du Canada [rouge et blanc]. Je voulais changer mes couleurs pour montrer que j’étais une toute nouvelle personne ; c’était un nouveau départ. »

« Georgian Downs avait ouvert [fin 2001] », raconte Clements, aujourd’hui âgé de 58 ans,

« et j’ai commencé à m’en sortir très bien. Je vais vous dire à quel point c’était bien à Georgian. Deux années de suite [2005-2006], j’ai collecté plus de 2 millions de dollars [en bourses] rien qu’à Georgian. Et non seulement j’avais plus de 2 millions de dollars, mais il y avait quatre autres gars, je sais que Steve Byron était l’un d’eux, qui avaient aussi plus d’un million de dollars. »

« Les propriétaires de la piste étaient alors vraiment favorables à « la game » … ils ajoutaient toujours des dates de courses. Puis, lorsque Great Canadian Gaming a acheté la piste, les choses ont changé. Ils ont commencé à réduire les dates de courses », soupire Dan. « Tout s’est détérioré après ça. Tu te souviens quand on faisait du piquetage et tout ça ? Parce qu’ils réduisaient les dates et nous avons dit qu’ils ne devraient pas avoir le droit de faire ça s’ils voulaient que le casino reste ouvert ? Avec le recul, 20 ans plus tard, nous avions manifestement raison. Mais les choses ont vraiment changé alors. Quelques années plus tard, après avoir déménagé en Floride, j’avais l’habitude de prendre l’avion et de venir faire du dimanche au mardi, et Simon Allard était le seul gars là-bas à plus d’un million de dollars par an à l’époque. C’était vraiment triste. »

« J’ai fait du transport pendant quelques années à l’époque. J’ai vécu dans de mon véhicule pendant un moment mais je détestais ça. Je faisais Grand River; Georgian coursait 3-4 jours par semaine.  J’allais à Western Fair le lundi et je rendais également visite à mon fils Ryan, qui allait à [l’Université de] Western à l’époque. J’étais juste toujours dans la voiture - j’en avais juste marre. Les choses allaient mal à Georgian. Nous avons fait de notre mieux mais nous n’avons rien pu changer… c’était écrit dans le ciel. »

« J’ai aussi eu beaucoup de problèmes personnels avec… disons simplement que chaque fois que vous êtes impliqué dans une entreprise familiale, cela peut être difficile. Je voulais juste m’éloigner. Depuis que je suis jeune, j’ai toujours eu des opportunités à cause de qui était mon père. Je gagnais beaucoup de courses et je conduisais pour à peu près tout le monde - j’ai gagné le « Battle of lake Érié » à Northfield avec Buckeye One pour Bill Robinson et j’ai même fini sur la couverture de Hoof Beats. Mais je voulais ma propre identité et j’avais besoin de me prouver que je pouvais le faire moi-même, alors finalement je me suis éloigné de tout ça »

« Nous avions parti « onlineharnessowner » à partir de la ferme de mon père et c’est devenu très important - je pense que nous avions 27 chevaux à un moment donné. Finalement, il y a eu un conflit monétaire et disons simplement que deux rois dans le même château ça ne fonctionnent pas… mon père est le roi.  Je n’aimais pas la façon dont ça se passait, je n’aimais pas la situation dans laquelle je me trouvais. »

« Je n’aimais pas le froid non plus, mais il y avait aussi le fait que je ne pouvais pas échapper à l’ombre de mon père, je suppose que vous aviez deviné. National Sports c’était mon père et pas moi… Cam Fella aussi. Je me souviendrai toujours de cette fois à Greenwood… certaines personnes se souviendront que le paddock était essentiellement au centre de la tribune. J’allais en conduire un dans une des premières courses et un gars dans la foule a crié « Hey Clements, attends que je dise à ton père que tu as quitté ton poste au département des chaussures plus tôt aujourd’hui ! » »

« Toute ma vie, je n’ai jamais pu échapper à ça ».

« On était donc en 2007. J’étais tanné de vivre dans ma voiture, j’ai eu des conflits avec mon père, j’ai eu des conflits avec Marty Fine - les choses étaient compliquées avec « Onlineharnessowner ». Tout était chaotique. Georgian Downs était après couler… Oh, en parlant de Georgian Downs, il y a autre chose qui s’est passé à ce moment-là que je devrais mentionner. Billy Elliott – pour ne pas dire Bill Robinson - m’a appelé un soir alors que je conduisais à Western Fair et m’a dit : “Nous voulons que tu viennes à Woodbine”. Randy ne prend aucun de nos chevaux, Ricky Macomber prendra ta place [pour nous] à Georgian - viens t’essayer. » Alors j’en ai parlé avec ma femme et j’ai décidé que j’allais tenter ma chance à Woodbine. Pour faire une longue histoire courte, le secrétariat des courses était super, ils m’ont trouvé quelques conduites, mais je n’ai jamais eu une « drive » de Billy Elliott pendant tout mon séjour là-bas. J’en gagnais quatre ou cinq par soir à Georgian et là, je regardais Ricky Macomber faire ça alors que moi, j’étais assis dans la salle des conducteurs à Woodbine. J’ai bien essayé, je suis resté environ quatre mois, mais ça n’allait jamais marcher.

« C’est une histoire vraie, et ça a aussi nui à ma relation avec Randy [Waples] parce qu’il pensait que j’essayais de lui voler ses conduites. Mark MacDonald venait d’arriver de Windsor et il conduisait des chevaux Robinson… c’était vraiment chaotique. »

« À l’époque de Greenwood, tout le monde était mon ami parce que je conduisais seulement les miens. Alors, toutes ces années plus tard, j’étais à Woodbine à essayer d’être ami avec tout le monde, mais être un « catch driver » est un job et j’ai vite compris qu’à Woodbine en tout cas, ce ne sont pas forcément tous vos amis quand vous êtes « catch driver ».  Les gens sont drôles tu sais. »

« Quoi qu’il en soit, ajoutez cela aussi, comme quelque chose d’autre dont je voulais m’éloigner. Tout ce qu’on m’avait dit qu’il allait arriver ne s’est pas produit. »

« J’étais rendu dans la mi-quarantaine et Ryan avait grandi et était à l’école à London. Il y avait une tonne de drames et de turbulences à la maison, c’était donc le moment idéal pour partir. Je savais que j’avais adoré Pompano [Park] quand j’avais 19 ans, et nous avions une place là-bas, alors nous avons décidé d’essayer la Floride. Mary et moi parlions justement l’autre jour de mon premier chèque de conduite à Pompano qui était d’environ 6 $ », dit-il en riant.

« Une histoire amusante à propos de cette époque, peu de temps après notre départ pour la Floride. Un soir, alors que je rentrais à la maison après les courses, il y avait ce gros SUV Cadillac juste dans mon derrière, et je me suis dit ‘Qu’est-ce qui se passe ?’ Il m’a suivi jusqu’à mon stationnement et quand je suis sorti de l’auto j’ai vu que c’était [Bill] Robinson. Il me regarde et dit « Eh bien, gamin, je peux voir que tu as sauté par-dessus un dollar pour arriver à un vingt-cinq cennes »” (rires). Il y avait beaucoup de gens qui ne comprenaient pas ce que je faisais.

« La meilleure chose qui me soit jamais arrivée personnellement, c’est que je sois allé en Floride. J’étais à 1 000 milles de n’importe quelle piste ou j’étais déjà allé. J’ai dû apprendre à… J’ai dû apprendre à me taire, c’est ça que je devais faire. Être à Pompano, être autour de Wally, de Bruce Ranger et de cette trempe de conducteurs était un enjeu totalement différent. Cela semblait beaucoup plus professionnel là-bas à l’époque. Je devais me conduire d’une manière comme si je recommençais à zéro. Je ne connaissais personne là-bas quand je suis arrivé.

« En gros, nous avons été en Floride pendant sept ans. J’ai d’abord obtenu un visa de cinq ans [2007-2011] et puis nous avons dû revenir un peu. Ensuite, nous avons obtenu le deuxième visa et nous sommes redescendus pour deux ans de plus [2014-15]. Heureusement, mes statistiques m’ont permis d’obtenir un visa sportif pour la deuxième fois, car statistiquement, cela montrait que j’étais dans le top 1% de mon domaine. »

« J’y suis allé pour prendre un nouveau départ et apprendre à devenir un conducteur [professionnel]. J’avais besoin de me prouver que j’en étais capable - et je suis devenu un conducteur là-bas. J’ai aussi apprécié la chaleur et le fait d’être assis là à fumer des cigares pendant les quelques années que j’y étais (rire). »

« Les deux premières années où j’étais là-bas, ils coursaient à peu près toute l’année, et beaucoup de grands noms n’étaient pas là en juillet et août - c’est comme ça que j’ai commencé à avoir beaucoup de conduites, parce que c’était à peu près juste Bruce [Ranger] et moi en été. C’est comme ça que j’ai pris un bon départ et c’est comme ça que j’ai fini par devenir le meilleur ami de Bruce Ranger. Ils nous appelaient “Spaghetti & Riz” - j’étais le gars de la Bible et il était le gars des AA et nous avions l’habitude d’organiser des meetings. Je partageais les informations des études bibliques à la piste et il tenait les groupes AA chez lui. Je faisais une réunion par semaine à la piste et il avait deux réunions AA par semaine chez lui. Il assistait à mes réunions et j’allais aussi aux siennes. »

« On était « Spaghetti et riz » parce que c’est la combinaison de deux choses différentes qui se rencontrent. Nous avons fait ça pendant un bon bout de temps. Nous sommes même allés plusieurs fois dans différents quartiers et avons vécu des expériences vraiment intéressantes là-bas… c’est tout ce que nous avons fait, c’était essayer d’aider les gens. Bruce y a vécu la majeure partie de sa vie, il était donc en contact avec des gens qui connaissaient des gens qui avaient besoin d’aide. Je me souviens d’une fois où nous avons ramassé un groupe de personnes et emmené environ 20 d’entre eux à l’église un dimanche - c’était fou. La plupart d’entre eux n’y sont allés que parce que nous avions promis d’acheter le petit-déjeuner pour tous après… nous aussi, et nous les avons tous emmenés au restaurant. »

« Nous avons pu vraiment aider certaines personnes, mais nous avons également vécu des cas vraiment tristes. Vaincre une dépendance n’est pas une chose facile », explique l’homme qui le sait très bien.

En ce qui concerne ses propres vices - on dit qu’un toxicomane restera toxicomane pour le reste de sa vie - est-ce que Clements est abstinent et sobre depuis plus de 20 ans maintenant ?

« Maintenant, je me fiche de parler autant de mes revers, mais je peux dire que je suis allé de travers pendant un moment une fois, lorsque nous sommes rentrés chez nous [2012]. J’ai eu un vrai combat avec mon genou, j’ai eu cinq opérations au genou et j’ai bifurqué un peu de pendant un certain temps avec les analgésiques. Je sais que je n’étais pas le seul conducteur à avoir lutté contre cela, et c’était juste une brève interruption dans ma vie… Je suis allé dans une clinique en Colombie-Britannique et j’ai arrêté les pilules. Le problème avec ces choses est qu’il ne s’agit pas de se défoncer, il s’agit simplement d’essayer de rester le même. Si vous ne les preniez pas, vous ne restiez pas le même, vous tombiez malade. J’avais juste besoin d’aller quelque part où je pourrais être malade pendant un certain temps », admet Danny.

« Après avoir passé cette étape, j’ai rencontré Ronnie Morales et nous sommes retournés en Floride et avons passé deux autres excellentes années là-bas. Nous avions dix chevaux quand nous sommes descendus et ça bien été pour nous. Notre écurie est devenue de plus en plus grosse et c’était très amusant.

« En 2015 cependant, Ryan et sa femme Charis nous ont informés que nous allions être grands-parents, et Mary m’a dit ‘Eh bien, ça suffit de te suivre partout’ et nous sommes rentrés à la maison » (rires).

« Nous avons aidé Ronnie à obtenir un visa pour être au Canada et sa femme a déménagé ici aussi, mais notre stock n’était pas assez bon pour Woodbine et les choses ne se sont pas nécessairement déroulées comme prévu. La plupart des chevaux étaient à son nom en tant qu’entraîneur et j’ai complètement arrêté de conduire en 2016… Je voulais juste être Norm [Clements] je suppose. Je voulais être le patron dans les coulisses », admet Dan.

« Nous nous sommes accrochés pendant environ trois ans et avons eu un peu de succès, mais ensuite j’ai eu un test positif [à l’automne de 2019] avec un deux ans appelé PL Nellie, et j’ai pratiquement abandonné. Je ne sais pas comment c’est arrivé. Mon petit-fils est né ce jour-là et j’ai reçu un appel téléphonique en revenant de l’hôpital… c’était Jeff Milner et il m’a dit que j’avais eu un test positif. J’étais sous le choc. Je savais que je n’avais rien donné au cheval qui ferait ça et j’ai juste dit « J’en ai fini avec ça ».

« J’ai essentiellement arrêté. Nous avons vendu notre maison sur la ferme [Prince Lee Acres] et avons décidé de suivre Ryan à London - il adore ça là-bas. C’était en fait pendant la COVID que nous avons déménagé. Je ne savais pas ce que je voulais faire mais j’avais une relation amour-haine avec [les courses] et je le faisais depuis l’âge de 13 ans. Croyez-le ou non, j’ai trouvé un emploi au bureau de poste. Ce n’est pas vraiment facile d’obtenir un emploi avec une 8e année, mais après environ six mois de processus, j’ai été embauché comme livreur. »

« La façon dont ils vous embauchent est que vous êtes sur appel au début, et en tant qu’homme à chevaux, je suis un lève-tôt. J’ai besoin d’être debout et de bouger. Je n’ai jamais reçu d’appel pendant un mois et quand j’en ai eu, j’ai eu un quart de travail d’une semaine. Cela ne me dérangeait pas, mais après cette semaine, je n’ai pas reçu d’appel pendant un mois. Quand ils m’ont appelé, c’était vers midi, et je n’étais pas vraiment intéressé à sortir vers midi pour un appel de dernière minute. Je savais que je ne pouvais pas faire ça. »

“C’est à ce moment-là que Ryan - mon conseiller (rire !) - m’a dit que je devais à nouveau conduire des chevaux et il m’a mis en contact avec Lorne House. J’aidais essentiellement Lorne pour… l’idée était que si je devais recommencer à conduire, je devais côtoyer les chevaux. J’étais un peu en surpoids et je n’avais pas été avec eux depuis un moment, alors j’ai travaillé l’hiver avec lui, avec la ferme intention que lorsque Hiawatha ouvrirait, je quitterais le travail et j’essaierais d’avoir quelques conduites. C’était plus qu’un simple plan d’embarquer sur le sulky, c’était surtout un projet à long terme genre « comment vais-je pouvoir y retourner ? », admet Clements. La première partie était de travailler pour Lorne. Il a été une partie intégrante de mon retour. »

« Nous avons amené quatre chevaux ‘P L’  dans son écurie. Je travaillais pour lui… il me payait et nous avons conclu un accord sur les factures des chevaux. C’était bien pour nous deux parce qu’il avait quelqu’un avec qui entraîner ses bébés et j’ai pu à nouveau travailler et côtoyer les chevaux », raconte Danny.  « J’ai aussi rencontré des gens que je ne connaissais pas auparavant, puis finalement, j’ai quitté mon travail pour lui quand Hiawatha a ouvert.

« Je suis un peu dans le même bateau maintenant que celui dans lequel j’étais lorsque je suis allé en Floride pour la première fois. Je ne connaissais pas vraiment beaucoup de gens dans la partie ouest [de l’Ontario], j’étais toujours plus à l’est comme à Kawartha Downs et tout. »

« Une chose que j’aime vraiment, c’est que je conduis contre beaucoup de jeunes maintenant. Je vois vraiment ma vie professionnelle de conducteur en trois étapes. La première, c’était quand j’avais 37 ans et que je suis devenu « catch driver ».  Deux, c’était quand je suis allé en Floride. Maintenant, c’est moi, version 3.0… mon travail consiste maintenant à courser contre des gars qui ont 20 à 30 ans de moins que moi. Mon objectif est d’être un gars qui peut encore les faire aller vite et gagner, mais je me concentre également sur l’encouragement. Si je vois un gars qui a 22 ans et qui a un gros ventre, j’ai envie de lui dire : « Tu es censé être un athlète professionnel... fais toi un programme et investis un peu en toi ».  Je n’ai jamais eu quelqu’un quand j’avais cet âge qui a fait ça avec moi… Je n’y vais pas en pensant que je vais être numéro un, mais j’aimerais qu’ils me voient comme un gars qui peut encore gagner et peut-être avoir une influence positive sur certains des plus jeunes - c’est ce que je considère comme mon nouveau rôle. »

Dan Clements a déclaré, dans son interview TROT de juin 2003, qu’il espérait un jour pouvoir essayer d’aider les gens, comme les gens l’avaient aidé. Il l’a fait pendant plusieurs années dans le sud de la Floride avec son ami Bruce Ranger, et il espère en faire plus ici au Canada.

“En ce moment, j’investis déjà dans quelques gars, pas avec des problèmes de dépendance, mais plutôt en essayant de les aider à rester positifs quant à leur carrière de conducteur et en leur donnant des conseils qui pourraient les aider dans ce sens. J’essaie de les encourager. Western Fair n’est ouvert que depuis une semaine, mais je commence maintenant à rencontrer des gars comme Colin Kelly et Tyler Borth - les prochains en ligne. Vont-ils pouvoir aller à Woodbine à temps plein un jour et savoir à quoi ça va ressembler ? Peut-être qu’ils veulent en savoir un peu plus sur ce que c’est et ce que vous devez faire pour réussir là-bas. J’ai essayé [Woodbine] et j’ai échoué mais au moins j’ai essayé, et je sais ce que c’est que de réussir à Pompano quand personne ne vous connaît. J’ai maintenant de la sagesse que je peux partager avec eux s’ils sont intéressés à écouter. »

Classé pas plus loin qu’au quatrième rang du classement des conducteurs à Hiawatha (2e), Dresden (3e) et Leamington (4e) en 2022, le gagnant à vie de 2 607 courses et 20,2 millions de dollars en bourses, arbore actuellement un brillant UDRS de 0,372. Est-il toujours le même conducteur qu’il était, ou se pourrait-il qu’après une interruption de six ans, il soit encore meilleur ?

« Je peux vous dire que j’ai perdu 25 livres, je vais au gymnase tous les jours et je deviens accro à ce nouveau régime soucieux de ma santé », partage-t-il. “Quand je fais quelque chose, je suis all-in et c’est vraiment la meilleure version de moi que les gens ont vue depuis longtemps. »

Qu’en est-il du tempérament et du langage grossier qui étaient synonymes d’un jeune Daniel Clements il y a de nombreuses années ? Un chrétien qui donne des cours d’étude biblique peut-il être un conducteur de chevaux « grande-gueule », ou est-ce quelque peu hypocrite ?

“Je suis un être humain. A la base parce que je crois en quelque chose auquel peut-être les autres ne croient pas, j’ai toujours la même… J’ai grandi dans le monde des chevaux, je suis toujours aussi compétitif, j’ai encore un peu la gueule d’égout parfois. Je suis tout sauf parfait, mais cette version de moi-même en ce moment, je suis beaucoup plus mature. Je suis toujours humain, j’ai encore des défauts sur lesquels je travaille en vieillissant, peut-être des défauts que je n’ai pas complètement réussi à résoudre mais je gueule rarement maintenant sur la piste - j’étais vraiment mauvais pour ça. Si j’ai quelque chose à dire à l’un des gars, je le dis généralement en tête-à-tête… cela semble être la meilleure façon. Je ne me fâche plus sauf si quelqu’un me fait quelque chose que je ne lui ferais jamais - alors nous avons un problème. Mon surnom était Lieutenant Dan, et j’ai eu quelques affrontements sur la piste cet été où j’ai dû tenir bon, mais je ne m’emballe plus trop avec ça. Je suis assez facile à vivre sur la piste, peut-être comparé à l’ancien temps », ri-t-il.

Et sa relation avec son père - comment ça va maintenant ?

« Nous avons toujours eu des problèmes », partage-t-il honnêtement, « mais nous en avons également surmonté beaucoup. Je peux vraiment dire que nous sommes probablement dans un meilleur endroit que nous ne l’avons été depuis très, très longtemps. J’ai toujours pensé que je reprendrais la ferme un jour - que le prince de Prince Lee finirait par devenir le roi de Prince Lee, mais mon père a 83 ans, il est toujours très actif et il ne va nulle part avant très, très longtemps temps. En fait, j’ai récemment découvert que ses plans pour la ferme principale, après son décès, sont de la transformer en une partie de la Jennifer Ashleigh Children’s Charity. Apparemment, cela va devenir un endroit où aller pour les personnes en difficulté - qu’il s’agisse d’un pasteur, d’un toxicomane ou de quelqu’un qui n’a pas de chance et qui a besoin d’un endroit où rester.

« C’est un peu difficile d’apprendre que quelque chose que vous pensiez qui finirait par être vôtre, toute votre vie, ne sera pas à vous après tout, mais après avoir eu un peu de temps pour y réfléchir, je suis d’accord avec ça. Au cours des 30 dernières années, l’organisme de bienfaisance nommé d’après notre fille a maintenant aidé les familles de plus de 15 000 enfants malades - c’est assez incroyable », raconte Clements.

Qu’en est-il professionnellement ? L’homme qui a déjà participé au Canadian Pacing Derby pour Bill Robinson, alors qu’il n’était doté que d’un mince million de dollars, peut-il se contenter de conduire sur les petites pistes du sud-ouest de l’Ontario ?

« Je sais qui je suis », partage Clements. « J’ai été un conducteur régulier qui a toujours su ce que c’était que de gagner. J’en ai gagné huit à Grand River un jour. J’ai gagné six fois de suite à Georgian dans mon bon temps là-bas. À un moment donné, j’ai su que je devais me prouver que je pouvais aller quelque part où personne ne me connaissait et que je pouvais y arriver - et je l’ai fait.  C’est ce que la Floride a fait pour moi. »

« Ils ont demandé à Keith Richards quelle était la meilleure partie d’être dans les Rolling Stones et il a dit : « Hey, c’était le périple. Une fois arrivés au sommet, nous avons découvert qu’il n’y avait rien là-bas ». Aujourd’hui, je dis à tout le monde de profiter de chaque moment. Les courses de chevaux sont amusantes - dans le football, ils peuvent profiter de la victoire pendant une semaine, dans les courses de chevaux, en tant que conducteur, vous en profitez pendant environ quatre minutes, puis si vous conduisez moins bien le suivant, vous êtes un pas bon. Vous ne pouvez pas vous réjouir longtemps. Les victoires ne m’ont pas soutenu et c’est ce qu’était la Floride pour moi. J’avais l’impression qu’il me manquait quelque chose. Je dois me réinventer. Tout ce que j’avais vécu avec nos filles et mes dépendances, et mon père, et ne pas me sentir digne de quoi que ce soit… tout cela a disparu quand j’ai finalement commencé à le faire par moi-même. Je n’avais rien d’autre que ma volonté que cela se produise, et nous avons tenu bon et c’est arrivé. »

« Je fais ça depuis que j’ai 13 ans et j’ai rencontré beaucoup de gens au cours de ces 40 ans et plus que je peux appeler des amis pour la vie.  Je ne pouvais pas imaginer être dans une meilleure situation que nous ne le sommes maintenant. Nous sommes grands-parents et nous habitons à cinq minutes de notre fils et de sa famille. Le seul regret que j’ai à propos de London est de ne pas l’avoir fait plus tôt. »

« Cette vie nous a amenés dans de nombreux endroits, y compris au chaud sous le soleil de la Floride pendant plusieurs années », sourit Clements.

« Emmenés dans beaucoup d’endroits » en effet. Dans le reportage de juin 2003, Dan a admis que dans les années qui ont suivi la mort de leurs filles, la jeune famille a souvent déménagé, ne restant nulle part pendant bien plus de deux ans tout en « essayant toujours de se sentir mieux dans sa peau ».

Cependant, en 1997, après être retourné au Canada une des nombreuses fois, Danny a créé l’écurie Last Home Stable - une écurie composée de trois membres : Daniel, Mary et Ryan Clements. C’était une façon symbolique de dire qu’ils étaient enfin de retour à la maison. De toute évidence, la dénomination de cette écurie était un peu prématurée, comme le montre clairement cette fonctionnalité, mais lorsqu’on lui a demandé cette fois…

Danny, es-tu finalement à la maison ?

La réponse a été : « Je pense que oui. »

Cet article a été publié dans le numéro de novembre de TROT Magazine.

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