Les livres de records vous indiqueront que la première victoire de Chris Christoforou a eu lieu en 1990 à Flamboro Downs derrière Delias Star, mais c'est faux.
By Keith McCalmont / Traduction Louise Rioux
À vrai dire, le vétéran conducteur, tout fraîchement gagnant du titre de meilleur conducteur à la conclusion récente de la réunion d'été à Mohawk, avec à son actif 117 victoires et des gains de 3 M $ en bourses, a enregistré sa première victoire dans le salon de ses parents à l'âge de quatre ans.
Comme il se le rappelle, il a présenté une assez bonne course.
« Vous souvenez-vous de ces petites voitures hot rods? Quand j'étais enfant, il y avait un tapis circulaire dans la maison, qui, pour moi représentait la piste de Meadowlands. J'alignais les voitures à dix de large derrière une barrière de départ faite maison et je les faisais courser tout autour au ralenti, les déplaçant l'une après l'autre. »
La plupart des enfants de son voisinage du nord de Toronto, rêvaient de courses de bout en bout sur patins, portant le chandail bleu et blanc des Leafs, mais pas Christoforou. Cet enfant avait une autre définition de l'expression de 'course de bout en bout'.
« Je gagnais toujours en partant de l'arrière, dit-il en riant de ces qualifications de son enfance. « C'était plus excitant et plus amusant à mes yeux. Même aujourd'hui, les gens diraient probablement que mon style en est le reflet. Je ne suis pas un conducteur de vitesse. J'aime gagner et il faut que le cheval, après la course, ait encore autant de capacité que possible. »
Le jeune Christoforou a usé le fil de cette moquette jusqu'à ce que son père, le renommé Charalambos Christoforou, accepte finalement de donner une chance à son fils de s'asseoir derrière un cheval. À l'âge de six ans. Six!
« Je me souviens avoir joggé un cheval du nom de Wide Chance à Greenwood. Il avait une tendinite et s'entraînait en vue de son retour en course. Cela m'a accroché aux courses sous harnais à bas âge, » dit Christoforou. « Plus jeune, c'était pour le plaisir. Mon père me laissait le choix de prendre soin de n'importe quel cheval en autant qu'il s'agisse d'un cheval sur lequel je ne risquais pas de commettre d'erreur. »
Mais comme Christoforou grandissait et commençait à démontrer du flair sur le sulky, ce, après d'innombrables milles d'entraînement, le pompeux Charalambos décida qu'il était temps pour son fils d'apprendre à conduire adéquatement.
Bien qu'il ne s'agisse pas du même genre d'entraînement auquel Walter Gretzky a soumis son fils pour préparer le jeune Wayne, par des mises en situation de match sur la patinoire de la cour arrière, ce n'était pas loin.
« J'entends encore mon père dire, 'Envoyez Chris avec le trotteur,' », dit Christoforou. « Tout le temps avec le trotteur, jamais avec les ambleurs, parce que si vous êtes capable de contrôler un trotteur, particulièrement un jeune, le reste viendra facilement. »
Pour un ado décharné, mener des trotteurs était l'équivalent pour un jeune hockeyeur de franchir deux ligues pour jouer contre des enfants plus âgés. Le défi, dans les deux cas, en est un de force et de finesse.
Les trotteurs enverront de petits signes annonçant au conducteur une faute à venir. Renverser ce processus n'est pas facile.
« Tout est question de guides. Cela peut vouloir dire quelques millimètres d'un côté au l'autre… que ce soit le temps de resserrer ou de relâcher quelque peu les guides soit que vous vouliez qu'ils allongent le pas et cessent de frapper, » d'expliquer Christoforou.
Pouvoir contrôler un animal de 1000 livres requiert de la force, tout comme un hockeyeur d'ailleurs, repoussant une mise en échec. Le revers tient de la finesse pure - - un petit coup sur le poignet qui peut changer une partie.
« Il vous faut savoir quoi et quand le faire. Les gens peuvent dire que quelqu'un est naturel, mais c'est de la foutaise. Certains peuvent être meilleurs en cela que d'autres, mais tout vient avec l'expérience, » dit-il. « Laissez-moi vous dire que la route a été longue. »
Cette longue route vers le sommet est venue plus tôt grâce à l'émergence d'un trotteur nommé Earl.
« Earl a été élevé sur notre ferme dès sa naissance. Nous l'avons entraîné et même si je n'en étais qu'à ma première année en carrière, mon père m'a laissé le mener, » dit Christoforou. « Mon père a été très bon pour moi ce faisant. Il m'a laissé conduire 90 % des chevaux de l'écurie dès que j'ai commencé à mener et il m'a réellement donné un grand coup de main. »
Quant à Earl, il a tout gagné. Derrière le cheval bai, Balanced Image, Christoforou a gagné tous genres de courses, allant même en Suède pour le conduire au fameux Elitlopp.
En 1993, Christoforou devint le deuxième plus jeune conducteur (derrière Ritchie Silverman) à gagner une course à la prestigieuse Breeders Crown, alors que lui et Earl se sont emparés de la division des trotteurs âgés dans sa propre cour, Mohawk.
« Earl a fracassé des records du monde et il était grandiose sur les pistes de toutes tailles, » dit Christoforou. « Il m'a fait mieux paraître que je ne l'étais en réalité à cette époque, par son immense talent. »
Comme l'écurie de son père connut une augmentation du nombre de chevaux, soit jusqu'à 80, cela a rendu la vie beaucoup plus facile à ce conducteur en ébullition.
« Mon père n'a réellement ralenti qu'au jour où j'atteignis la vingtaine et que je réussisse en tant que conducteur. Sans aucun doute, ce fut un avantage, » dit Christoforou.
Sa carrière atteint un sommet en 2000 quand il a mené Astreos vers une formidable victoire lors du Little Brown Jug pour le compte d'un partenariat comprenant son père.
« Le Jug dominait la liste des choses à faire. En grandissant, c'étaient le Hambletonian et le Jug, » dit Christoforou. « Avoir la chance d'en gagner un et de bien le réussir, représentait pour moi la Coupe Stanley. Le fait que mon père et mon cousin soient propriétaires d'une part du cheval, était fou. »
La victoire en Jug nécessitait un très bon cheval, mais aussi une conduite grisante compte tenu de la présence du puissant Gallo Blue Chip.
« Je savais que j'avais un assez bon cheval pour participer au Jug. Il courait bien et avait fini deuxième lors de la Cane (ainsi que dans The Meadowlands Pace). Ma seule inquiétude était que je ne croyais pas pouvoir battre Gallo Blue Chip. C'était un monstre, » se rappelle Christoforou.
Afin de battre le monstre, Christoforou se formula une stratégie presque impensable.
« Je savais que je n'avais pas la puissance pour doubler Gallo Blue Chip dans le dernier quart de mille parce qu'il était trop fort. Il ne laisserait personne le passer. Il était spécial, » dit Christoforou. « Mais j'ai pensé que si je pouvais passer devant lui, sur une piste d'un demi- mille, il pourrait avoir le même problème avec Astreos. »
La chance a bien joué son rôle aussi quand Astreos s'est tiré à l'intérieur de Gallo Blue Chip lors de la finale du Jug. Ni l'un ni l'autre n'allait gagner cette manche après s'être autant battu pour la tête, et Chris refusant de la céder. Mais cela a forcé la tenue d'une deuxième course et on connaît la suite.
« Nous avons rallié la tête et Astreos fut tout simplement génial, » dit un Christoforou tout sourire.
Ce n'était pas tout à fait comme partir dernier pour finir premier comme il le planifiait sur la moquette de sa mère, mais le résultat a fait que son nom a été gravé dans l'histoire.
« Casie Coleman a récemment affiché une photo du trophée du Jug sur lequel apparaissait le nom de tous les gagnants et avant que je ne le gagne, il y avait peu de conducteurs, s'il y en avait, basés au Canada. Mais après moi, on y voit beaucoup de noms familiers et je me suis dit que c'était vraiment cool, » de noter Christoforou.
Après Astreos, il semble bien que la carrière de Christoforou fut fulgurante.
Son nom est attaché à toutes les courses stake valant la peine d'être gagnées en Ontario - - y compris de multiples Canadian Breeders', le Fan Hanover, Oakville, Burlington, aussi bien que les Champlain Stakes (pour les deux, amble et trot. Il allait aussi s'emparer de deux autres titres des Breeders' Crown, avec Grinfromeartoear lors du Three-Year-Old Pace, et de l'Allamarican Nadia dans la Three-Year-Old Filly Pace.
En 2002, il a encore gagné l'O'Brien Award et se mériter sa troisième en 2003, l'année où il a aussi dépassé son plateau de 50 M $ de gains.
Puis ses statistiques diminuèrent de 2008 à 2010, alors que Christoforou faillit à la tâche d'atteindre la marque du siècle en nombre de victoires durant ces trois saisons.
Quelque chose s'était éteint.
« Je me suis blessé et on m'a prescrit des médicaments anti-douleur, et c'est ainsi que tout a commencé, » d'expliquer Chistoforou au sujet de ses luttes personnelles antérieures bien documentées.
En 2010, une absence prolongée du triple gagnant d'un O'Brien lui a été causée par le besoin de chercher de l'aide extérieure pour reprendre sa vie en main.
Avait de nombreux grands participants de l'industrie, comme Norm Clements, qui étaient là pour le supporter.
« Cette industrie est vraiment une famille, et l'inébranlable appui que j'ai reçu de gens tel Norm, et plusieurs autres, m'a grandement aidé, » se rappelle Christoforou.
« Je suis chanceux d'être passé de l'autre côté » dit-il. « Un jour, j'ai réalisé ce que je devais faire, et que j'avais besoin de prendre soin de moi d'abord. »
Il n'aime pas beaucoup parler de cette sombre période de sa vie.
Et peut-être que le fait de s'attarder aux aspects négatifs d'une durée de quatre ans, ne fait que servir de chair à canon au commérage ou à la négativité.
Le rocker canadien légendaire, Neil Young, a déjà dit, « La seule bonne chose au sujet du passé est que vous ne pouvez le changer. Tout ce que vous pouvez changer est ce qui arrive maintenant. »
« Je vais au gym et essaie de bien manger. Mais plus important encore, je vais à la maison vers ma famille. J'essaie d'éviter les extrêmes, » dit-il.
Son épouse Camilla, sa mère et son père, ainsi qu'une foule de bons amis et collègues l'ont soutenu et accompagné dans les moments où il en avait le plus besoin. Et il leur en est reconnaissant. Mais il ne s'éternisera pas là-dessus.
Plutôt, il préfère focaliser sur les choses pour lesquelles il est reconnaissant, soit la famille.
« J'ai une fille de douze ans, Emma, et un fils de six ans, Niklas, » dit Christoforou avec fierté. « Emma est née d'une relation précédente et demeure avec sa mère, Joanne Colville, mais je la vois aussi souvent que possible. »
Niklas ne fait pas courser de hot wheels autour du tapis de salon de la famille Christoforou.
« Niklas n'a aucune espèce d'intérêt pour les chevaux, ce qui est épouvantable aux yeux de tout le monde, », dit Chistoforou en riant. « Particulièrement du fait que sa mère était impliquée dans cette industrie Norvège avant qu'elle ne vienne ici. Nous nous sommes rencontrés quand elle est arrivée au Canada et qu'elle a travaillé pour mon père. Nous aimons tous les deux les courses mais cela n'intéresse aucunement Niklas.
« Emma, pour sa part, est folle des chevaux. Elle est une bonne cavalière et tout récemment, elle a gagné des rubans à la Milton Fair. Elle a vraiment la main avec les chevaux, ce qui est très compréhensible puisqu'elle a vécu sur une ferme et autour des chevaux toute sa vie. »
Sa relation avec ses parents lui est toute aussi importante.
« Mes parents et moi sommes très près et j'aime les voir aussi souvent que possible. Mon père a une écurie et je travaille en soirée, alors c'est difficile, mais nous nous accordons du temps. Ils passent beaucoup de temps avec mes enfants et cela fait mon bonheur, » dit-il.
Et son épouse, Camilla, est probablement le plus beau cadeau qu'il n'ait jamais reçu.
« Mon épouse maintient la famille ensemble. Ce n'est pas facile d'être mariée à quelqu'un qui travaille sept jours par semaine, tard le soir, même quand vous saviez que ce serait comme cela, » dit Christoforou. « Nous venions tout juste de commencer à se voir quand j'ai eu mes problèmes, et elle a été brave de tenir jusqu'au bout. »
Dans ce qui paraît être une tournure d'événements improbable, il semble bien que Standardbred Canada ait joué un rôle clé dans la résurgence de la carrière du vétéran par la voie d'un simple sondage réalisé sur le Web au cours des quelques mois ayant suivi son retour.
« Le sondage demandait, si vous pouviez avoir l'un de ces conducteurs pour votre cheval lors d'une course de 1 M $, quel serait-il, » se rappelle-t-il, concernant la question qui offrait 20 possibles conducteurs. « Une semaine ayant passé, j'ai regardé pour savoir où j'en étais, et me voilà au 17e rang. J'étais OFFENSÉ.
« Je suis assez certain que si ce sondage avait eu lieu quelques années auparavant, je me serais retrouvé en tête de la liste. Ça m'a blessé, Je ne voulais pas être ce gars-là. Je voulais être au premier rang. Peut-être est-ce un peu vaniteux, mais c'est ainsi que je me sentais. Depuis ce moment-là, j'ai mis beaucoup d'efforts avec les entraîneurs en leur communiquant autant de renseignements que je pouvais obtenir après une course. Cela m'a motivé, »
Même si les pires moments de ses problèmes étaient derrière lui, Christoforou a réalisé qu'il n'était pas tout à fait lui-même.
« Je ne sais pas si j'avais perdu la passion, mais il m'a fallu du temps pour me remonter et considérer cela sérieusement, tout comme je l'avais déjà fait. Plutôt que de faire cela pour gagner ma vie, j'ai commencé à le faire parce que je voulais gagner des courses et avoir du plaisir, » dit-il.
Et maintenant qu'il a encore du plaisir et qu'il gagne des courses, Christoforou déborde d'enthousiasme dans le fait de maintenir quelques habiletés de ce sport, comme elles s'appliquent à la conduite et au horsemanship, tout en se portant à la défense des changements qui peuvent venir en aide à la croissance des courses sous harnais dans un marché radicalement concurrent.
De retour à ses propres racines, Christoforou met ses collègues conducteurs au défi de ralentir.
« Quiconque peut faire de la vitesse. Je peux lancer un sac de sable sur un sulky de course et attacher les guides alentour, et ça créera de la vitesse, croyez-moi, » dit-il. « Pour moi, la partie excitante des courses de chevaux réside dans les stratégies. Vous placer dans la bonne position dans la course - - parfois en avant, mais pas chaque fois. Ils ne paient pas à la borne du quart. »
« Les chevaux les plus dangereux (à essayer et à battre) sont ceux qui se ménagent pour ensuite arriver en tête. Je mène un cheval appelé American In Paris. Elle course dans la série 'Mares Preferred', et si elle se sent bien et dans un bon état d'esprit, elle peut gagner à partir de n'importe où sur la piste. Quand elle est bien, tout ce que vous avez à faire est de lui dicter le tracé et la mener à la bonne position pour qu'elle fasse le travail. C'est un cheval à qui on a enseigné comment courser. »
Avec la réunion de Woodbine en cours, Christoforou se méfie d'un retour à des conduites canon sur des pistes de sept huitièmes de mille, lesquelles pourraient non seulement se révéler mauvaises pour le cheval, mais aussi pour le parieur.
« Je vois beaucoup de gars à Woodbine qui sont très agressifs tôt dans la course, et je n'aime pas cela. Je crois que c'est difficile pour les chevaux, » dit-il. « De plus, si vous regardez les chevaux à l'entrée du stretch à Mohawk, à partir du cheval e tête au dernier, il y a habituellement environ cinq longueurs. À Woodbine, le peloton pourrait s'étirer sur 15 ou 20 longueurs. Ce ne peut être agréable pour ces gens qui parient sur les chevaux. »
« Je souhaite vraiment qu'à un moment donné, nous puissions changer cela et faire des courses sur de plus longues distances. Des gens pensent que c'est plus difficile sur le cheval, mais je pense que ce serait plus facile puisque nous aurions des fractions plus lentes plus tôt. Cela garderait les chevaux sains plus longtemps. Les thoroughbred travaillent comme cela et je pense que c'est quelque chose qui pourrait être intéressant pour les amateurs et les parieurs. »
En plus de varier la longueur des courses, il y a une autre bête noire sur laquelle il aimerait travailler.
« Le poteau de départ à l'UN-fair est le pire, » dit-il. « Ce n'est pas bon pour le public parieur. Ce poteau devrait, au maximum, être à deux longueurs avant le départ. Il est trop loin et si un cheval se trouve à l'intérieur, il n'y a rien de juste dans ce départ. »
Étant donné qu'il a grandi auprès d'un père dont l'écurie est remplie de bons chevaux, il est juste de dire que Christoforou a reçu un assez bon départ dans le sport.
Il secoue la tête alors qu'il raconte l'histoire d'une photo qui trône sur le manteau de cheminée à la maison de ses parents.
« J'ai trois ans et je porte le costume d'un conducteur du temps, assis derrière un cheval de plastic avec une brouette attachée à l'arrière et des guides, » grogne-t-il. « Je porte un casque protecteur de frappeur de baseball, des lunettes solaires et une petite cravache. C'est la photo de ma première victoire. Mon avenir a donc été décidé tôt, il va sans dire. »
Même s'il y a eu des cahots en cours de route, il est maintenant de retour en tête des conducteurs canadiens avec des gains de plus de 4,7 M $ en date du 17 octobre. Christoforou, maintenant âgé de 43 ans, s'approche rapidement des 6 000 victoires et 100 M $ de gains en carrière, et pourrait bien avoir besoin d'emprunter les lunettes de soleil de ce jeune prodige, l'avenir lui semblant brillant encore une fois.